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L'ordre du Temple solaire (OTS) est un groupe religieux ésotérique néotemplier fondé en 1984 à Saconnex-d'Arve, en Suisse, par Luc Jouret et Joseph Di Mambro à la suite de la fusion de la Fondation Golden Way et de l'Ordre international chevaleresque de Tradition solaire (OICTS). Ce faux ordre de chevalerie est principalement connu pour des suicides collectifs en Suisse, en France et au Canada ayant fait en tout 74 victimes en 1994, 1995 et 1997 et pour les controverses qui ont suivi. L'affaire a été un facteur majeur du durcissement de la lutte contre les sectes en France.
En France, l'OTS est considéré comme une secte par le rapport de la commission d'enquête parlementaire de 1995.
Joseph Di Mambro, dit « Jo », est un bijoutier à l'emploi d'une compagnie spécialisée dans le dégrossissage de l'or ayant fait six mois de prison pour escroquerie. Dans les années 1950, Di Mambro commence à pratiquer le spiritisme et fréquente un groupement successeur du Service d'action civique (SAC), fondé par Charles Pasqua. À la fin des années 1960, il est membre et responsable d'une loge de l’Antiquus Mysticusque Ordo Rosae Crucis (AMORC) de Nîmes, en France. En 1974, il fonde le Centre de Préparation à l'Age Nouveau (CPAN) à Collonges-sous-Salève.
Dès 1975, une communauté genevoise, nommée la Fraternité de la pyramide, se rencontre régulièrement dans une maison de la campagne genevoise afin d'y passer des moments de solidarité, de discussions et d'entraide touchant notamment des thèmes tels que l'alimentation et la spiritualité. Le chef d'orchestre Michel Tabachnik s'y rend, apprécie l'ambiance et en devient membre. En 1977, il rencontre Joseph Di Mambro qui lui propose de reprendre cette communauté et de la structurer. L'année suivante, les deux hommes créent la Fondation Golden Way, dont Michel Tabachnik devient le président,.
Localisée dans une villa à Saconnex-d'Arve, en Suisse, la fondation se présente comme un cercle de conférences privé, qui fait aussi bien dans l’ésotérisme que dans la musique, et qui a pour but de discuter des problèmes de pollutions, d'environnement et des liens sociaux. Elle tend ainsi à développer une connaissance autour de l'évolution de la qualité de vie future telle que la vie saine, l'agriculture biologique ou encore les techniques de soins parallèles. Par des conférences (avec des invités comme Iannis Xenakis, Alexis Weissenberg, Nikita Magaloff, Mireille Darc, Hubert Reeves, Alain Delon, Michel Jonasz), des recherches et des interviews télévisés, la fondation s'ouvre à la vie publique et politique. Au début des années 1980, Joseph Di Mambro et Michel Tabachnik, tous deux intéressés par la philosophie, l'ésotérisme et la spiritualité, décident d'amener une vision mystique et religieuse à la fondation. Une pièce nommée le « Sanctuaire » y est aménagée afin d'y méditer et d'organiser des rituels servant à « entrer en lien avec le monde de l'invisible ». Les membres sont revêtus de capes blanches avec des symboles comme la rose rosicrucienne et la Croix des templiers. De son côté, Michel Tabachnik tient plusieurs conférences sur l'ésotérisme. Di Mambro crée également la société Amenta servant à diffuser les idéologies de la Fondation Golden Way et à recruter de nouveaux membres.
Joseph Di Mambro est alors perçu par les membres de la fondation comme un médium, un être « Walk-in » (un être qui prend le corps d'un autre).
En 1982, Di Mambro annonce qu'une « grande mission » attend la fondation. Il annonce également qu'un « enfant-roi » doit naître au sein de la communauté. Di Mambro a rapidement le projet que Dominique Bellaton, jeune femme toxicomane qui aurait été recherchée par des proxénètes pour l'assassiner et qui s'intègre à l'ordre à la demande de ses parents, soit la mère porteuse de « l'enfant cosmique ». Une cérémonie dans la crypte de l'ordre, avec effets spéciaux (une épée touche le ventre de la jeune femme devant l'assistance et un éclair de lumière surgit), contribue à confirmer aux membres les pouvoirs surnaturels de « conception théogamique » des dirigeants, sans rapport sexuel, alors qu'en fait, Dominique est sa maîtresse et est enceinte depuis quelques semaines. L'enfant, Emmanuelle (de son nom cosmique Chris car porteuse du Christ), naît le .
En 1981, Camille Pilet fait un infarctus et rencontre l'homéopathe belge Luc Jouret. Ce dernier, avec le cas de Camille Pilet, commence à s'intéresser aux médecines douces, aux thérapies alternatives comme la macrobiotique, l'iridologie et entame un attrait pour l'ésotérisme,. En 1982, il crée le Club Amenta (qui se renomme Atlanta). Par la suite, il effectue plusieurs conférences où il défend l'existence d'une analogie de la démarche spirituelle avec l'homéopathie. Ayant remarqué la bonne élocution et l'aisance de communication de Luc Jouret, Di Mambro décide de le rencontrer. En parallèle, Di Mambro va se rapprocher de l'Ordre rénové du Temple (ORT), qui se veut comme une résurgence de l'Ordo Templi Orientis et qui avait été créé avec des anciens rosicruciens. En 1983, à la mort de Julien Origas, leader de l'Ordre rénové du Temple, Di Mambro pousse Jouret à reprendre cet ordre qui en devient le nouveau grand maître la même année. La nomination de Luc Jouret provoque immédiatement une scission au sein de l'Ordre rénové du Temple d'où va naître l'Ordre international chevaleresque de Tradition solaire (OICTS) dont il prend alors la direction.
En 1984, la Fondation Golden Way et l'Ordre international chevaleresque de Tradition solaire fusionnent pour donner naissance à l'Ordre du Temple solaire (OTS) en mêlant divers principes des structures précédentes et regroupant plusieurs membres de pays francophones. Luc Jouret en est le conférencier et recruteur et devient le grand maître bien que le véritable cerveau et maître des finances de l'organisation soit Jo Di Mambro.
L'organisation change souvent d'inspiration mais ceux-ci sont principalement inspirés par l'ésotérisme et l'occultisme de par sa croyance en l'existence et en l'efficacité de pratiques qui ne sont reconnues ni par les religions, ni par les sciences, et requièrent une initiation particulière. Les objectifs affichés du groupe étaient :
En 1985, Di Mambro décide d'implanter un centre de survie au Canada dans la perspective d'une éventuelle guerre nucléaire. Un domaine, nommé Sacré-Cœur, est acheté à Sainte-Anne-de-la-Pérade, au Québec, afin d'y créer une ferme biologique. L'organisation a créé plusieurs filiales, soit officielles soit cachées afin de financer ces achats immobiliers. Le plus souvent, Di Mambro réalise des profits en revendant à des membres de la secte ses participations dans les différents projets immobiliers: Joseph Di Mambro, Luc Jouret, Dominique Bellaton et Camille Pilet s'achètent deux chalets jumelés chemin Belisle à Morin-Heights (Québec) et, avec l'argent des membres, plusieurs autres maisons pour les activités de l'OTS (dont une ferme à Cheiry (Canton de Fribourg) gérée par le membre Albert Giacobino).
La même année, Di Mambro demande à Tabachnik de faire des écrits afin de s'en inspirer pour « grandir au sein de l'ordre », nommés « Les Archées ». Ceux-ci, au nombre de 21, sont écrits par Michel Tabachnik à partir de la bibliothèque ésotériste héritée de son père et des emprunts aux ésotéristes Raymond Bernard (fondateur de l'ordre des rose-croix AMORC), Carl Gustav Jung et Jacques Breyer qui inspire les références aux Templiers et qui donne quelques conférences à l'OTS. Ces écrits, peu compréhensibles par les membres, sont alors expliqués par plusieurs conférences que donne Tabachnik à travers le monde.
Dès 1986, Antonio Dutoit, membre de l'OTS, évoque la mégalomanie, les supercheries et les malversations des chefs. Il dénonce le comportement de Joseph Di Mambro qui menait alors un train de vie contraire à ses enseignements. Il accuse également une mise en scène de tours de magies lors des cérémonies. Par la suite, le fils de Di Mambro, Elie, révèle les aspects financiers louches de son père. À la vue de ces informations, quelques membres et plusieurs donateurs (dont des notables, industriels, propriétaires) réclament le remboursement partiel des fonds qu'ils ont engagés alors que cet argent a été détourné pour investir dans des entreprises fictives, propriétés ou pour les fondateurs qui ne se refusent rien (villa, voiture de luxe, voyages),. Joseph Di Mambro promet de restituer les sommes demandées mais les démissions de plusieurs membres de l'OTS se succèdent. La villa de Saconnex-d'Arve est vendue et Di Mambro garde seulement les membres les plus dévoués très proches de lui. Les autres membres n'étaient plus vraiment au courant des réunions et événements de l'OTS.
Dans les années 1990, Luc Jouret, ayant abandonné sa profession d'homéopathe pour se consacrer pleinement à l'OTS, commence à effectuer des conférences sur le développement personnel dans diverses entreprises, universités et banques, principalement au Québec mais aussi en Suisse, en France et en Belgique. Di Mambro, voyant d'un mauvais œil ces conférences, car « diffusant les idées et principes de l'OTS au public », commence à saborder les conférences de Jouret qui finalement abandonne ses activités et devient totalement dépendant de Di Mambro. Jouret sera destitué de ses fonctions de grand maître qui seront remises à Robert Falardeau. De retour en Europe, Joseph Di Mambro, Camille Pilet et Alexandre Borgeaud s'achetèrent un terrain à Salvan (Valais) et y construisent trois chalets (Luc Jouret habitera dans celui de Di Mambro).
Joseph Di Mambro, confronté à de plus en plus de critiques de la part des membres décide de modifier ses enseignements et de prêcher un transit vers une autre planète. Au printemps 1994, il convoque tous les membres et fidèles de l'OTS, et explique que la mission du Temple arrivait à sa fin et que les dirigeants de l'OTS disparaîtraient sur l'étoile Sirius. Les autres membres devront reprendre le flambeau.
Les dirigeants commencent alors à surveiller ses membres qui disent vouloir quitter l'OTS. Certains sont espionnés, d'autres mis sur écoute téléphonique.
Devant l'ampleur des contretemps, la décision du transit vers Sirius est prise. Afin de préparer le transit, Joseph Di Mambro confie des missions particulières à ses membres proches les plus dévoués. Plusieurs étapes sont organisées :
La préparation des premiers massacres commence dès l'année 1993 :
Depuis 1985, quatre membres actifs de l'OTS, à savoir Joseph Di Mambro, Luc Jouret, Dominique Bellaton et Camille Pilet, possèdent deux chalets, coupés en deux appartements chacun, numérotés 197, 197A, 199 et 199A . Ceux-ci sont situés côte à côte à Morin-Heights (Québec), au Canada.
Dans un premier temps, le but est donc d'éliminer les traîtres de l'Ordre. Antonio Dutoit ayant critiqué la mégalomanie, les supercheries et les malversations des chefs de l'Ordre est considéré, avec son épouse Suzanne, comme traitres. Ceux-ci doivent donc être exécutés selon un rituel précis. De plus, le couple ayant eu un enfant, Di Mambro l'associe comme l'Antéchrist et doit être éliminé par deux « chevaliers de l'Ordre » afin de prévenir à sa réapparition.
En août 1994, Jerry et Colette Genoud quittent la Suisse pour le Canada. Ceux-ci achètent dans un magasin du matériel destiné à déclencher un incendie. Le 17 septembre, Dominique Bellaton invite chez elle, dans l'appartement 199A du chalet de Morin-Heights, le couple Antonio Dutoit et Suzanne Robinson-Dutoit pour un dîner (Dominique Bellaton étant la seule membre de l'OTS que le couple Dutoit acceptait de rencontrer).
Le , Dominique Bellaton invite à nouveau, à l'appartement 199A, le couple Dutoit, ainsi que leur bébé de 3 mois, pour un dîner. La famille est alors assassinée : Antonio et Suzanne reçoivent plusieurs coups de couteaux principalement au cou et à la tête; leur enfant a reçu des coups de couteau ayant lacéré ses poumons. Dominique Bellaton et Joël Egger repartent pour la Suisse à 22 h 10 pendant que Jerry Genoud et son épouse Colette nettoient les lieux et placent les corps dans un réduit au sous-sol. Dans la nuit du au , le couple Genoud incendie le chalet et se donne la mort, dans la chambre à coucher, par flunitrazépam.
Les pompiers arrivent sur les lieux de l'incendie à environ 09 h 00. Toutes les portes étant verrouillées de l'intérieur, les pompiers profitent de l'éclatement des portes du patio, sous l’effet de l'intensité de la chaleur, pour pénétrer dans l'appartement et constatent la présence de deux corps carbonisés dans la chambre à coucher : un étendu sur le lit et l'autre couché sur le sol. Après maîtrise de l'incendie, les pompiers constatent la présence de plusieurs bidons remplis d'essence dans plusieurs pièces de l'appartement. L'unité des crimes contre la personne de la Sûreté du Québec reprend alors l'affaire. À 11h 00, deux systèmes de mise à feu sont découverts dans le sous-sol et deux autres systèmes du même type sont retrouvés dans le chalet voisin. Des taches de sang ont également été découvertes : après un test au luminol, il est avéré que du sang humain a giclé sur toute la surface de la pièce et que quelqu'un a tenté de le nettoyer.
Le lendemain, 6 octobre, les trois corps de la famille Dutoit sont découverts au sous-sol.
Après l'élimination des traîtres, l'exécution des membres peut commencer.
Entre janvier et juin 1993, Joël Egger achète un pistolet Walther PPK et un pistolet Smith & Wesson de calibre 22 L.R. En juin 1994, il se procure quatre appareils Servocom et quatre télécommandes Swatch.
Les 18, 19 et 20 septembre 1994, Joseph Di Mambro tient des réunions à Salvan où entre 17 et 19 personnes sont présentes. Les 25 et 29 septembre, deux autres réunions ont lieu à la ferme de Cheiry.
Dans la nuit du au , en Suisse, deux incendies se déclarent : un vers 23 h 55 à la ferme « La Rochette » à Cheiry et un autre dans trois chalets, au lieu-dit « Le Fond du Ban », à Salvan. Lors de l'arrivée des pompiers, ceux-ci découvrent 23 personnes mortes à Cheiry et 25 à Salvan. Les victimes étaient, dans la plupart des cas, « revêtues d'une cape rituelle blanche, noire ou dorée, selon le degré d'initiation atteint ».
À Cheiry, vingt victimes sont mortes d'une ou de plusieurs balles dans la tête, deux étouffées par un sac plastique autour de leur tête et une autre probablement de la même manière le 3 octobre. 22 personnes présentaient dans leur sang du flunitrazépam et une de la théobromine. Le bâtiment, fermé de l'intérieur, a ensuite été incendié le lendemain par un système de mise à feu automatique.
À Salvan, il se révèle qu'il a été injecté aux victimes (ou qu'elles se sont injecté elles-mêmes) un poison à base de curare, d’opioïdes et de benzodiazépines. Par la suite, les chalets ont été fermés de l'intérieur et ont été incendiés également par un système de mise à feu automatique. Les corps se trouvaient seulement dans deux des trois chalets.
Le matin du , 300 plis destinés aux médias, à d'autres adeptes et à plusieurs personnalités politiques ou publiques, dont Charles Pasqua, seront envoyés par Patrick Vuarnet (fils de Jean), membre de la secte, selon les consignes de Di Mambro. Ces courriers divers contenaient principalement des messages extraits des croyances de l'ordre. C'est à ce moment que les personnes extérieures à l'ordre découvrent la volonté de transfert vers l'étoile Sirius.
Lors de la découverte des corps sur place par la police, il est découvert que les incendies de la ferme de Cheiry et du chalet de Salvan ont été actionnés par des systèmes de mise à feux. Cependant, certains de ces systèmes n'ayant pas fonctionné ont épargné un grand nombre de documents, livres et cassettes vidéos de l'OTS. Grâce à ceux-ci, la police put alors comprendre le fonctionnement de la communauté et reconnaitre certains de ses membres dont Michel Tabachnik (en concert au Danemark au moment des massacres). Celui-ci est auditionné par le juge d'instruction André Piller pendant trois jours et est innocenté d'avoir été l'auteur du massacre. D'autres anciens membres de l'OTS sont également auditionnés comme Thierry Huguenin qui témoigne avoir été appelé le à Salvan sur la promesse que de l'argent qui lui était dû lui serait rendu ce jour-là. Mais, pressentant un danger, il aurait quitté les lieux. Il explique ensuite qu'il pense que le projet était de l'assassiner avec les autres afin d'atteindre le nombre de 54 victimes, en rapport avec les 54 chevaliers de l'ordre du Temple exécutés sur le bûcher le sous le règne de Philippe IV le Bel,. Certains autres membres, après les événements, déclarent continuer à soutenir les idées de la secte et regrettent même de ne pas avoir été choisis pour le "transit".
L'enquête conclut finalement à un suicide collectif poussé par Jo Di Mambro et Luc Jouret. Les enquêteurs ordonnent la destruction des lieux « pour ne pas choquer les croyants, ni attirer les curieux », une décision qui soulève des controverses.
Dans la nuit du 15 au , seize personnes — treize adultes et trois enfants de 2, 4 et 6 ans — ont été immolées au lieu-dit « Le Trou de l'Enfer », dans une clairière isolée du plateau du Vercors, à Saint-Pierre-de-Chérennes (Isère) en France,,. Ils sont retrouvés le .
L'enquête menée par la Section de recherches de la Gendarmerie nationale de Grenoble qui a confié les expertises techniques à l'Institut de recherche criminelle de la Gendarmerie nationale (IRCGN) a déterminé que quatorze personnes avaient été tuées par une ou deux balles de pistolet 22 Long Rifle, après avoir absorbé des sédatifs, puis incendiées à l'aide de bois et d'essence. Selon la théorie des enquêteurs, les deux exécuteurs seraient l'inspecteur Jean-Pierre Lardanchet et l'architecte André Friedli. Ils se seraient tiré une balle de 9 mm parabellum dans la tête (armes retrouvées près de leurs corps) en se jetant dans le foyer. Le Procureur de Grenoble a alors ouvert une information judiciaire pour « assassinats » et « association de malfaiteurs » avec possibilité de complicité extérieure.
À la suite de ces événements, la peur des sectes s'installe parmi la population française et suisse.
Le , lors du journal de 13 heures de la chaîne française TF1, le journaliste Gilles Bouleau évoque que la secte a survécu et s'est réunie derrière Michel Tabachnik. De ce fait, il déclare indirectement que Michel Tabachnik est le commanditaire du massacre du Vercors. Par cette information, tous les médias reprennent ce thème. Michel Tabachnik dément toutes les accusations. Il est appris qu'en septembre 1994, Michel Tabachnik a donné deux conférences à Avignon à la demande de Di Mambro. Ces conférences étaient des séances préparatoires aux massacres qui allaient survenir en octobre de la même année. Par la suite, il est reconnu que Michel Tabachnik aura bien participé à ces conférences mais sans en connaître l'issue finale des massacres et qu'il s'agissait d'un coup monté de Jo Di Mambro.
Lors de l'enquête, du fait de la mort des deux dirigeants à Salvan en 1994, Michel Tabachnik est l'unique prévenu dans le cadre de l'affaire. En effet, le juge d'instruction considère, par ses écrits, « Les Archées », et ses conférences, que Michel Tabachnik aura pu inciter les adeptes à se donner la mort. Il est donc mis en examen pour « participation à une association de malfaiteur en vue de commettre un crime ». Michel Tabachnik publie pour sa défense Bouc émissaire. Dans le piège du Temple Solaire, avec une préface de Pierre Boulez. Le sont présentées les conclusions de l'enquête du deuxième massacre du Vercors par le juge d'instruction Luc Fontaine.
Lors de la préparation du procès du tribunal correctionnel à l'encontre de Michel Tabachnik, les familles des victimes (pensant toutes à un suicide collectif) se sont constituées en partie civile. Ayant consulté les dossiers des experts, la partie civile identifie, selon elle, quelques incohérences dans l'enquête comme le fait que l'environnement organique autour des corps des victimes immolées est complètement intact et ne présente aucune trace d'incendie. La partie civile demande alors des contre-expertises et remet en question la thèse du suicide collectif. Selon Alain Vuarnet, fils et frère de deux des victimes, menant une enquête privée parallèle depuis 1995, les « suicides collectifs » des membres de l'ordre du Temple solaire en décembre 1995 dans le Vercors n'ont toujours pas été véritablement élucidés. Il s'est plaint de l'absence de coopération de la justice, qui a toujours refusé d'enquêter sur la piste d'un assassinat. Selon l'expert, le professeur Gilbert Lavoué, mandaté par M. Vuarnet, du phosphore a été trouvé sur les lieux, dénotant l'usage de lance-flammes, ce qui impliquerait qu'il n'y aurait pas eu de suicide, mais une mise en scène. Selon M. Vuarnet « Nous restons persuadés, mon père et moi, que ce n'est pas avec quelques branchages humides que ces seize corps ont été carbonisés à ce point ». Le résultat des expertises révèle « un excès en phosphore de plus de 21 à 40 % » ; certaines victimes avaient des sacs en plastique sur la tête, ce qui a été expliqué selon la thèse de l'instruction, comme un signe rituel ; enfin, certaines victimes ont été droguées.
Le , au Musée-bibliothèque de Grenoble transformé pour l'occasion, s'ouvre le procès du tribunal correctionnel à l'encontre de Michel Tabachnik (défendu par Francis Szpiner) pour « association de malfaiteurs ». Cependant, la partie civile se scinde en deux camps : d'un côté, mené par Alain Vuarnet, ceux qui estiment que le procès ne doit pas se porter sur la responsabilité de Michel Tabachnik mais sur l'enquête elle-même qu'ils estiment ne pas avoir été jusqu'au bout dans les recherches ; et de l'autre, mené par l'Union nationale des associations de défense des familles et de l'individu victimes de sectes (UNADFI), qui estiment que Michel Tabachnik et ses écrits sont la cause de tous ces suicides et qu'il faut éradiquer les sectes. Dès l'ouverture du procès, les avocats de la partie civile commencent à s'affronter, se déchirer et à s'invectiver (notamment entre Alain Leclerc et Francis Vuillemin).
Au septième jour de procès, plusieurs anciens membres de l'OTS sont auditionnés et témoignent à la barre. Parmi les témoignages, deux visions s’opposent : certains se montrent choqués, en colère contre la secte et les actes commis et d'autres demeurent fidèles aux actes, à Di Mambro et au transit vers Sirius. Au huitième jour, Michel Tabachnik est enfin auditionné et raconte avoir été manipulé et berné par Jo Di Mambro. Lors du dixième jour, le procureur requiert 5 ans de prison ferme à l’encontre de Michel Tababchnik pour le rôle qu'il aurait eu dans le conditionnement des adeptes. Le , le tribunal correctionnel de Grenoble relaxe Michel Tabachnik au bénéfice du doute.
Le parquet, lui reprochant toujours d'avoir, « par ses écrits ésotériques », poussé les adeptes à un « transit vers Sirius », fait appel à la décision du tribunal correctionnel et Michel Tabachnik est à nouveau jugé en 2006. Par cet appel, la partie civile menée par Alain Virante espère prouver que l'enquête du juge d'instruction Luc Fontaine s'est fourvoyée et que les adeptes ont bien été assassinés. Sous leur demande, le professeur Gilbert Lavoué va alors prélever d'éventuelles traces de phosphore sur les dépouilles des victimes. Celles-ci sont donc déterrées. Il est trouvé que les cadavres présentent un excédent de phosphore. Finalement, les experts judiciaires ont considéré que cette analyse n'apportait rien de nouveau à l'affaire et qu'elle ne remet pas en doute la décision du juge Fontaine. L'avocat général, estimant que le prévenu n'était pas membre actif de l'ordre et que « sa responsabilité dans les décès n'était pas établie », ne requiert aucune peine contre lui. Il est une seconde fois relaxé en .
Le , cinq autres membres sont retrouvés morts à Saint-Casimir au Québec,. Les membres se sont donné la mort, afin de rejoindre Sirius par «transit», avant que la maison soit incendiée par un système automatique de mise à feu. Trois adolescents sont retrouvés vivants, ayant survécu parce qu'ils ont négocié avec leurs parents leur droit à la vie.
Listes des victimes des massacres de 1994 et 1995 et 1997 classées par ordre alphabétique.
Sur les 74 victimes dont l'âge varie de 3 mois (Christopher Emmanuel Dutoit) à 79 ans (Renée Pfaehler), dix mineurs ont été tués, parfois en compagnie de leurs parents (familles Jaton, Lardanchet).
3 personnes sont mortes, le 30 septembre 1994, dans le chalet de Di Mambro au à Morin-Heights (Québec), au Canada.
Les 2 personnes suivantes, étant les tueurs des trois précédentes, se donnent la mort dans la nuit du 4 au 5 octobre 1994 :
23 personnes sont mortes, dans la nuit du 4 au 5 octobre 1994, à la ferme « La Rochette » à Cheiry (FR), en Suisse:
25 personnes sont mortes, dans la nuit du 4 au 5 octobre 1994, dans trois chalets, au lieu-dit « Le Fond du Ban », à Salvan (VS), en Suisse:
16 personnes sont mortes, dans la nuit du 15 au , au lieu-dit « Le Trou de l'Enfer », à Saint-Pierre-de-Chérennes (Isère), en France:
5 personnes sont mortes, dans la nuit du 22 mars 1997, à Saint-Casimir (Québec), au Canada :
Selon Françoise Champion, sociologue, ce groupe a une « filiation templière bricolée ». Jean-François Mayer décrit certaines croyances du groupe, telles que les notions de « transit », (voyage de l'âme vers une autre planète, par le biais du suicide, notion similaire à celle du groupe Heaven's Gate) ou l'importance de « transporter le germe de vie sur une autre planète », comme les causes de la dérive ultérieure. Une bonne part des concepts et principes de l'ordre étaient inspirés des écrits « hermétiques » de Tabachnik, « Les Archées ».
La hiérarchie de l'ordre est absolue. Les cérémonies rituelles auraient été mises en scène par un membre du nom de Tony Dutoit. Selon les termes du jugement rendu en 2001 pour Michel Tabachnik, les lieux de culte ont été le « théâtre d'apparitions et de manifestations perçues comme surnaturelles au cours de cérémonies rituelles. […] De nombreux témoins ont rapporté avoir vu […] des matérialisations d'objets ou de personnages ». Une ancienne adepte déclare avoir assisté à « l'apparition de Maîtres, du Saint-Graal, de l'épée Excalibur, des douze apôtres et même du Christ ». En réalité, les apparitions surnaturelles du Maître, au son d'une musique cosmique assourdissante et au milieu d'hologrammes, ne sont que Jocelyne Di Mambro, l'épouse de Jo, juchée sur un tabouret.
Dans le documentaire d'Yves Boisset sur cette affaire, Bernard Geiger, un responsable de la police cantonale du Valais, déclare :
« Je le vois davantage comme un meurtre collectif. Je rejette formellement la thèse du suicide collectif décidé par tous – cette idée est du pur cinéma. »
Le réalisateur construit son argumentation autour de la question : « 74 morts et pas de coupable ? ». La justice soulignant également, lors du procès de 2001, « le caractère improbable de ce nouveau massacre plus d'un an après la disparition des dirigeants » et les investigations qui viennent confirmer « un assassinat collectif suivi du suicide des assassins », tout en établissant que, selon les témoins, la plupart des victimes de 1995, comme celles de 1994, avaient « consenti le sacrifice de leur vie ».
En plus d'Alain Vuarnet, d'autres membres de la famille des victimes, René et Muguette Rostan, Willy et Giséla Schleimer, ont demandé en 2001 puis en 2004 une réouverture de l'instruction afin de contester la thèse du suicide collectif. Réouverture également demandée par Jean-Pierre Brard en 2006.
Maurice Fusier, reporter à Radio France, relance la même thèse de l'assassinat au phosphore en 2006.
Une thèse présentant une origine politico-mafieuse à l'affaire est étayée par certaines sources, dont le psychiatre Jean-Marie Abgrall, évoquant de possibles liens de Luc Jouret avec des membres de Gladio.
En 2006, le cinéaste Yves Boisset dénonce également la piste « politico-mafieuse », qu'auraient négligée les enquêteurs. Il souligne en particulier les liens de Di Mambro avec Jean-Louis Fargette, un « parrain » de Toulon assassiné en 1993. Le cinéaste a réalisé un film, Les Mystères sanglants de l'OTS, pour exposer son point de vue. Il dit voir « l'ombre de Charles Pasqua dans cette affaire », et a parlé de « trafics d'armes entre le Canada et l'Angola », ce que le journal Le Monde a nommé Angolagate, lequel article ne faisant aucune référence à l’OTS. Yves Boisset déclare également que le juge Piller aurait « brûlé des pièces à conviction » en détruisant le chalet, scène du crime. Il déclare également que l'inspecteur Jean-Pierre Lardanchet, trouvé mort dans le Vercors, était un agent des renseignements généraux et proche de Charles Pasqua. Lardanchet est présenté par d'autres sources comme un agent de la Police de l'Air et des Frontières ou comme une « taupe » infiltrée dans l'ordre.
Plusieurs mois après l'affaire, deux journalistes de France 2 se rendent dans les décombres du chalet de Salvan et déclarent trouver, dans la poubelle de la cuisine, des cassettes audio en excellent état où sont enregistrées des conversations téléphoniques d'adeptes, espionnés par Di Mambro. Bien que cette découverte semble incroyable, des extraits du contenu des cassettes sont diffusés et jugés conformes aux croyances et thèses de l'ordre.
L'enquête de Boisset le conduit à trouver un lien avec l'affaire Yann Piat (ex-députée du Front national de 1986 à 1988 puis députée de la 3e circonscription du Var sous l'étiquette UDF de 1988 à sa mort), qui s'était intéressée à un projet immobilier d'un membre de l'OTS peu de temps avant d'être assassinée, le 25 février 1994, par deux motards. Arnaud Palisson, ancien analyste de la Direction centrale des Renseignements généraux (DCRG) à Paris, considère pour sa part que Boisset « s’est fait balayer par les arguments prodigieusement fallacieux de journalistes de province en quête de leur Watergate en Vercors ».
Lors des fouilles de l'appartement de Joseph Di Mambro un document a été retrouvé, ainsi qu'un exemplaire imprimé dans un chalet, et attribué à Jocelyne Duplessis, épouse de Di Mambro, dont le contenu indique :
L'Ordre du Temple solaire est également implanté en Espagne, en particulier dans les îles Canaries. En 1984, Luc Jouret a donné des conférences à Tenerife. Le leader de l'ordre en Espagne a lui-même vécu dans le sud de l'île, aussi le seul Espagnol qui est mort dans le suicide de l'Ordre du Temple solaire était un barbier précisément de Tenerife. En 1998, une secte était soupçonnée d'avoir planifié un suicide rituel dans le parc national du Teide (Tenerife) qui a été empêché par les autorités. Les polices espagnole et allemande initialement l'ont reliée à l'Ordre du Temple solaire.
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